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jeudi 21 août 2025

Sur la Résurrection, volume 2, Réfutations (Garry Habermas).




Le volume 2 de la série On the Resurrection de Gary Habermas, intitulé "Refutations" (2024), se concentre sur la réfutation des explications alternatives et des objections concernant la Résurrection de Jésus.
Son objectif est de démontrer que les données historiques, même celles reconnues par les érudits critiques, pointent vers la Résurrection comme la meilleure explication.
Habermas utilise de nouveau sa méthode des "faits minimaux", qui s'appuie sur des faits historiques largement acceptés par un large éventail de spécialistes, y compris les sceptiques.

Voici une exploration plus détaillée de l'argumentation de Habermas dans chacun des cas :

L'argument de Hume contre les miracles :

 L'exigence de Hume : David Hume soutient qu'aucun témoignage ne peut établir un miracle à moins que la fausseté du témoignage ne soit elle-même plus miraculeuse que le fait qu'il tente d'établir. Il exige des témoins avec une intégrité, une éducation et une sagesse "incontestables" pour "assurer contre toute illusion". De plus, il déclare qu'il ne doit y avoir aucune uniformité d'expérience contre le miracle, sinon le miracle ne mériterait pas cette appellation.
Réfutation :
Habermas juge l'exigence de Hume d'une intégrité "incontestée" et d'une capacité à "assurer contre toute illusion" comme irréaliste et auto-invalidante. Il se demande si de tels témoins ont déjà existé ou si une telle "sécurité absolue" pourrait être garantie.
Hume est accusé de pétition de principe en définissant les miracles de manière à ce qu'ils soient a priori impossibles. Il postule une "expérience uniforme" contre les miracles sans produire de preuves pour cette uniformité elle-même. Pour Habermas, cela empêche toute enquête empirique sur les revendications de miracles.
Le philosophe George Mavrodes, cité par Habermas, critique la taille de l'échantillon de Hume, la jugeant "trop petite" pour être statistiquement significative. Si l'échantillon était élargi, des témoignages de miracles apparaîtraient inévitablement, ce que Hume ignore.
Hume aurait commis une erreur logique informelle d'argument ad hominem en critiquant les rapports de miracles provenant de "nations ignorantes et barbares".
Concernant les miracles jansénistes du XVIIIe siècle en France, Hume a reconnu qu'ils étaient "attestés par des témoins crédibles et de distinction, dans un âge savant, et sur le théâtre le plus éminent du monde". Pourtant, il les a rejetés pour des raisons qui semblent arbitraires, ce qui suggère que sa conclusion préexistait à l'examen des preuves.

2° La théorie de l'évanouissement (Swoon Theory) :

 Cette théorie prétend que Jésus n'est pas mort sur la croix mais a simplement perdu connaissance, pour ensuite se réveiller dans le tombeau.
 Réfutation : Habermas argumente que la brutalité de la crucifixion aurait rendu la survie de Jésus et sa capacité à se présenter comme un ressuscité victorieux hautement improbable. Un Jésus à peine conscient, gravement blessé et affaibli n'aurait pas pu rouler la pierre du tombeau, vaincre les gardes, ni convaincre ses disciples d'une Résurrection glorieuse. Même des érudits "libéraux" comme Schleiermacher ont jugé cette hypothèse invraisemblable, soulignant qu'un homme "malade avec une force vitale affaiblie" n'aurait pas pu se déplacer si tôt après la crucifixion et apparaître en bonne santé. Habermas note que la plupart des spécialistes considéraient cette théorie comme "discréditée" ou "dépassée" dès la fin du XIXe ou le début du XXe siècle. Elle a rarement été défendue par des spécialistes qualifiés depuis.

3° L'hypothèse des hallucinations :

Cette théorie propose que les apparitions de Jésus après la crucifixion étaient des visions subjectives, des produits de l'esprit des disciples.
 Réfutation :
Apparitions de groupe : La Bible mentionne une apparition à plus de cinq cents personnes à la fois (1 Corinthiens 15:6). Habermas et d'autres soulignent que les psychologues et psychiatres n'ont aucune preuve documentée de "hallucinations collectives" où plusieurs personnes partagent exactement la même perception sensorielle sans un référent externe commun. L'apparition collective à 500 témoins est une "réfutation très puissante" de la pseudo-hallucination subjective.
Nature des apparitions : Contrairement aux hallucinations subjectives qui sont généralement brèves et sans conséquences physiques tangibles, les apparitions de Jésus étaient variées (individuelles et de groupe, intérieures et extérieures), souvent prolongées, et ont conduit à une transformation radicale chez les témoins. Jésus est apparu avec un corps changé qui ne mourrait plus.
Transformation des disciples : Le passage de la peur et du désespoir à une conviction inébranlable et à la volonté de mourir pour leur foi est un argument fort contre une simple hallucination. De nombreux spécialistes critiques reconnaissent la force de ce fait.
Conversion de Paul : L'expérience de Paul sur le chemin de Damas, qui le transforme de persécuteur en apôtre, est particulièrement difficile à expliquer par une hallucination. Paul, en tant que Pharisien, aurait eu des compétences d'enquête rigoureuses. Des érudits comme Orr et Hayes ont noté que Paul a utilisé des termes de transmission traditionnels et a enquêté auprès des témoins oculaires (Galates 1:18-2:10), ce qui rend une explication subjective improbable. Les explications naturalistes (accident vasculaire cérébral, épilepsie, coup de chaleur) sont considérées comme de "simples possibilités" sans preuves suffisantes.
Ancienneté du témoignage : Les récits des apparitions, y compris la formule pré-paulinienne de 1 Corinthiens 15:3-7, datent de très tôt après la Crucifixion (année trente), ce qui ne laisse pas le temps à une légende basée sur des hallucinations de se développer et de s'ancrer.

4° La théorie de la légende :

Cette théorie soutient que le récit de la résurrection a évolué comme un mythe ou une légende, éventuellement inspiré par des mythes païens de "dieux mourant et ressuscitant".
Réfutation des parallèles païens : Habermas, citant des spécialistes (athées) comme Bart Ehrman, affirme que les prétendus parallèles avec des "dieux mourants et ressuscités" (tels qu'Attis, Osiris, Adonis ou Marduk) ne sont absolument pas équivalents à la Résurrection corporelle de Jésus. Ces mythes décrivent souvent des cycles saisonniers, des retours symboliques, ou des figures divines qui ne sont pas réellement ressuscitées physiquement de la mort, et certainement pas pour ne plus jamais mourir. De plus, les interprétations académiques de certains de ces mythes (comme Marduk et Mithraism) ont évolué, invalidant les parallèles.
 Contre l'idée d'une création libre de légendes, Habermas s'appuie sur des modèles de tradition orale (comme ceux de Gerhardsson, Bailey, et Bauckham) qui démontrent que la transmission des récits de Jésus était une "tradition orale contrôlée informelle". Cela signifie qu'il y avait une stabilité et une fidélité au "stock commun d'événements et d'enseignements rappelés collectivement", même si les récits pouvaient varier dans leurs détails. Le témoignage des témoins oculaires, comme celui de Pierre retranscrit par Marc selon Papias, était crucial pour cette transmission fidèle.
Le fait que des éléments clés des Évangiles, comme le récit de la Passion de Marc, remontent aux années quarante de notre ère (moins de deux décennies après la Crucifixion), ne laisse pas le temps pour un développement légendaire substantiel.
Les résumés de sermons dans les Actes des Apôtres, datés très tôt après la crucifixion, soulignent que le corps de Jésus n'a pas subi de corruption (Actes 2:14-36 et 13:16-41). Cela implique un tombeau vide.

4° Vol du corps :

 Réfutation des théories de vol du corps : Les théories selon lesquelles le corps de Jésus aurait été volé (par les disciples ou les autorités) sont réfutées par Habermas comme manquant de preuves substantielles. Ces explications alternatives sont souvent de "simples possibilités" sans le soutien de données concrètes. La critique du point de vue de Ehrman sur la non-connaissance de ce qui est arrivé au corps de Jésus, malgré l'acceptation de traditions précoces, est également abordée. Il est intéressant de l'étudier plus à fond.

5° Les critiques de Bart Ehrmann.

Habermas note qu'Ehrman a changé d'avis sur la question de l'inhumation traditionnelle de Jésus et du tombeau vide. Ehrman acceptait auparavant l'historicité de l'inhumation traditionnelle et du tombeau vide, mais il a depuis adopté la position selon laquelle "nous ne savons pas, et ne pouvons pas savoir, ce qui est réellement arrivé au corps de Jésus".
Ehrman avance trois arguments principaux contre le récit évangélique d'une inhumation traditionnelle par Joseph d'Arimathie, et Habermas les réfute :
- Ehrman soutient qu'il est "difficile de donner un sens historique à cette tradition juste dans le contexte du récit de Marc", se demandant pourquoi Joseph d'Arimathie n'est pas mentionné plus tôt. Habermas répond qu'il n'y a aucune "violation majeure" des règles de rapport si un personnage apparaît plus tard dans le récit.
- Ehrman note aussi que ni Paul ni le credo majeur de 1 Corinthiens 15 ne mentionnent Joseph d'Arimathie. Habermas minimise ce point, suggérant que cela n'est pas un "problème majeur" étant donné la nature propre des textes du credo, qui n'ont pas vocation à tout dire.
- Ehrman interprète Actes 13:28-29 comme signifiant que c'est le Sanhedrin dans son ensemble qui a enterré Jésus, et considère que c'est la tradition la plus ancienne sur le sujet. Habermas qualifie les mouvements d'Ehrman de "vagues" et de "conclusion injustifiée sur un sujet important sans le soutien factuel nécessaire".
Habermas critique plus généralement la méthodologie d'Ehrman, qu'il qualifie de "principe de commodité" ou de "science de la commodité". Ehrman lui-même utilise cette expression pour critiquer les mythologues qui "suppriment ou ignorent les données gênantes". Habermas applique cette critique à Ehrman en soulignant qu'il accepte pourtant l'ancienneté des traditions des Actes (datant des années trente, juste après la Crucifixion) qui affirment l'inhumation de Jésus dans un tombeau et l'absence de corruption de son corps (Actes 13), mais il ignore pourtant les implications logiques de cette même tradition pour l'historicité du tombeau vide. Habermas perçoit cela comme un "tri injustifié des données disponibles" ou un "choix apparent" qui semble motivé par les préférences théologiques d'Ehrman.
Ehrman déclare que les historiens "ne peuvent ni prouver ni réfuter" historiquement la Résurrection de Jésus. Il soutient que ces croyances ne peuvent être "affirmées" que par la foi. Habermas trouve cette position "choquante" du point de vue épistémique, la considérant comme une question philosophique et non une limite de l'érudition néotestamentaire. Habermas s'étonne qu'Ehrman consacre une partie significative d'un chapitre aux "hypothèses visionnaires" s'il ne souscrit à aucune théorie naturaliste particulière. Pour Habermas, cela ressemble à un "plan de repli" ou à une "perte de confiance" dans une explication naturaliste spécifique.
En réponse à l'agnosticisme d'Ehrman sur le corps de Jésus, Habermas réitère les arguments en faveur du tombeau vide, qui, pour lui, pèsent plus lourd que les objections d'Ehrman :
◦ La localisation du tombeau à Jérusalem, où la prédication chrétienne primitive a commencé, rendrait impossible la survie de la chrétienté si le corps de Jésus y était resté. La prédication apostolique aurait été le tout dernier endroit où elle aurait pu commencer si le tombeau de Jésus était resté occupé.
◦ Le témoignage des femmes découvrant le tombeau vide est un détail "embarrassant" qui renforce l'historicité des récits, car il est peu probable qu'il ait été inventé à des fins apologétiques dans une culture où le témoignage féminin avait moins de poids légal.
◦ Les récits du tombeau vide sont "multiplement attestés" dans les Évangiles de Marc, Matthieu, Jean et probablement Luc.
En résumé, Habermas critique Ehrman non seulement sur les détails spécifiques de l'inhumation de Jésus, mais aussi, et peut-être plus fondamentalement, sur sa méthode, l'accusant d'appliquer un double standard en acceptant certaines données précoces tout en rejetant d'autres informations connexes lorsque cela sert ses conclusions théologiques préconçues.

Ce volume 2 de Gary Habermas est une réponse exhaustive et méthodiquement rigoureuse aux principales objections naturalistes et alternatives à la Résurrection de Jésus, en s'appuyant sur des arguments tirés de l'historiographie, de la psychologie et de l'analyse textuelle pour défendre la supériorité de l'explication de la Résurrection face aux alternatives. Aussi fondamental que le volume 1 !

Paul-Éric Blanrue.