BLOG DES AMIS DE PAUL-ÉRIC BLANRUE --- ARCHIVES, ACTUALITÉS, PROSPECTIVES --- DÉMYSTIFICATION ET CONTRE-HISTOIRE

dimanche 24 septembre 2023

"L'existence du monde et la vérité des principes fondamentaux de la logique ne peuvent pas faire l'objet d'une vérification scientifique expérimentale."

"L'existence du monde et la vérité des principes fondamentaux de la logique – pour prendre deux exemples frappants – ne peuvent pas faire l'objet d'une vérification scientifique expérimentale. L'exercice de la science en présuppose la vérité. Si vous n'y croyez pas, essayez donc de démontrer scientifiquement que le monde existe et que vous n'êtes pas un cerveau soumis à une simulation électro-cérébrale, comme les hommes dans le film Matrix. C'est rigoureusement impossible. Il est pourtant parfaitement rationnel de penser que nous ne vivons pas dans Matrix."
"Il est impossible de vérifier scientifiquement la vérité des principes de la logique, car tout raisonnement, toute expérimentation scientifique en présupposent la vérité, attendu qu'ils constituent les lois mêmes de la pensée.
Autrement dit : une proposition peut avoir un sens et être vraie, sans être l'objet d'une vérification expérimentale."
"L'idée selon laquelle tout est explicable par la science est évidemment fausse. En voici deux preuves : ni l'existence du monde, ni l'intelligibilité de la nature ne sont explicables par la science. La science ne peut pas fonder par elle-même l'explication de sa propre légitimité puisque son exercice présuppose justement cette légitimité."
"1'. L'existence de l'univers a manifestement besoin d'une explication (intuition de base), 2'. l'existence de l'univers n'est pas explicable par la science (nous l'avons démontré), 3'. donc tout ce qui a besoin d'une explication n'est pas explicable par la science (le scientisme est donc faux). Le champ de l'explication rationnelle dépasse celui de l'explication des phénomènes par la science physique, uniquement préoccupée des variations des propriétés quantifiables du réel."
Frédéric Guillaud.



samedi 23 septembre 2023

La question de l'immigration est résolue depuis longtemps par les principes simples du droit naturel !



"Un individu a-t-il le droit moral de quitter son pays et de migrer ? Oui, bien sûr. Il ne viendrait à l’idée de personne de légitimer l’enfermement de quiconque dans une contrée, comme cela se passe en Corée du Nord. Tout individu a également le droit d’offrir ses services à l’étranger. Ce même individu a-t-il toutefois le droit moral d’obliger les gens du pays où il veut se rendre de l’accueillir, de l’engager et de les contraindre à pourvoir à ses besoins ? Bien sûr que non. On a le droit absolu de choisir avec qui l’on veut cohabiter sur sa propriété. La liberté de se mouvoir d’un migrant ne peut en aucun cas être supérieure à la liberté qu’a l’autochtone de consentir à l’accueillir et à couvrir ses frais...
En vertu du droit naturel une aide doit être un acte bénévole, consenti, volontaire, et certainement pas une obligation imposée par l’État ou un lobby. Si je veux contribuer à aider certaines personnes en difficulté, j’ai le droit de les choisir et non de les subir. Ce n’est pas à l’État de me dire qui je dois soutenir. Dans le cas des migrations actuelles, mon aide est rendue obligatoire par le seul fait que les immigrés bénéficient de l’argent public et d’infrastructures provenant de l’argent public qui n’est rien d’autre que l’argent de tous les contribuables privés, distribué sans leur consentement. ll convient ainsi de supprimer toutes les aides publiques aux clandestins...
Si l’on entend défendre la liberté dans un sens (celui du migrant dans son pays de départ), il faut accepter la liberté dans l’autre sens (celui de l’autochtone dans le pays d’arrivée). Les dépenses publiques n’étant rien d’autre que l’argent des contribuables, c’est aux contribuables de décider où va leur obole. C’est à la charité privée et aux associations humanitaires de s’occuper des clandestins avant leur rapatriement... Le problème de la migration est donc en premier lieu celui de l’État-providence, qu’il faut abolir, sinon les migrants se rendraient en Algérie, en Tunisie ou au Maroc.
La liberté de migrer n’est pas négociable, mais la liberté d’accueillir ou pas les migrants non plus. Quand on évoque le principe de liberté il faut tout prendre - ou rien. C’est un bloc. Il faut accepter les conséquences pratiques de la théorie : le libre choix. Dans les deux sens. Un sécessionniste cohérent ne s’opposera pas, ainsi, à ce qu’un particulier, embauche un étranger, le paye, lui trouve un logement et l’entretienne sur ses propres fonds, que l’État soit d’accord ou pas. C’est le principe de la liberté et de la propriété. La discrimination, tant décriée par les belles âmes, est non seulement un acte naturel (nul n’est obligé d’aimer les blondes ou les parfums capiteux) mais elle est vertueuse. Elle permet d’exclure qui nous semble devoir l’être (pour des raisons que personne n’a à expliquer) mais aussi d’accueillir qui nous voulons (pour des raisons ne nécessitant pas davantage d’explication) du moment que nous prenons cette personne entièrement à notre charge et qu’elle reste dans les limites de notre propriété."

Paul-Éric Blanrue, Sécession.





"Laissez venir à moi les petits migrants !" : qui sont les auteurs de la néo-morale de l'Église de Rome ?


Extraits du livre Sodoma :

"Le Vatican a une communauté homosexuelle parmi les plus élevées au monde"
"L’homosexualité s’étend à mesure que l’on s’approche du saint des saints ; il y a de plus en plus d’homosexuels lorsqu’on monte dans la hiérarchie catholique. Dans le collège cardinalice et au Vatican, le processus préférentiel est abouti : l’homosexualité devient la règle, l’hétérosexualité l’exception."
"La lubricité des religieux dépasse parfois les normes selon plusieurs témoignages recueillis. — Il y a eu un prêtre qui a voulu que je lui urine dessus. Il y en a qui veulent qu’on se déguise en femme, en travestis. D’autres pratiquent des actes SM un peu ignobles. (Il me passe les détails.) Un prêtre a même voulu faire une partie de boxe avec moi tout nu."
"les prêtres homosexuels adorent les Arabes et les « Orientaux »."
"Mohammed a très vite compris que le sexe était « la grande affaire » et « la seule véritable passion » temporelle de la plupart des prêtres qu’il fréquente."
"Si on va au Vatican et qu’on tombe sur un gros poisson, on est beaucoup mieux payés. C’est pas dans les 50-60 euros, mais plutôt dans les 100-200. On a tous envie d’avoir un gros poisson."
"Ces policiers et carabiniers me confirment que les faits divers abondent : prêtres détroussés, rançonnés ou violentés ; prêtres arrêtés ; prêtres assassinés aussi, dans ces lieux de drague non homologués. Ils me décrivent les chantages, les sex-tapes, le « revenge-porn catho » et les innombrables affaires « de mœurs » du clergé."
"La plupart des prêtres paient bien ; ils marchandent rarement. J’imagine qu’ils économisent sur leurs loisirs, mais jamais sur le sexe. Un prêtre ça n’a pas de famille, pas de loyer à payer."
"En 2018, il rendra publique la vie sexuelle de trente-quatre prêtres et un document de 1 200 pages avec les noms des ecclésiastiques concernés, leurs photos, les enregistrements audio et captures d’écran de ses échanges sexuels avec eux, à partir de WhatsApp ou Telegram. J’ai pu consulter ce « dossier », baptisé Preti gay : on y voit plusieurs prêtres célébrer la messe en soutane puis, tout nus, célébrer d’autres types d’ébats via leur webcam."
"Encore aujourd’hui, certains prélats et monsignori y ont leurs habitudes : les promenades à la tombée de la nuit dans l’ascèse créatrice, où l’on assoit la beauté sur ses genoux, sont le prétexte de rencontres impromptues qui peuvent mener loin."
"Tous les rapports sur les scandales financiers du Vatican, toutes les affaires de pédophilie, tous les dossiers sur l’homosexualité sont conservés à la secrétairerie d’État, y compris tout ce qu’on sait sur Paul VI. Si on avait rendu publics ces documents, des papes, des cardinaux, des évêques seraient peut-être inquiétés par la justice. Ces archives ne sont pas seulement la face sombre de l’Église. C’est le diable !"
"On recrute dans toutes les directions, notamment des migrants qui ont besoin d’un permis de séjour : le gentilhomme de Sa Sainteté leur promet, s’ils se montrent « compréhensifs », d’intervenir pour qu’ils obtiennent des papiers."
"Selon plusieurs sources, le point critique de ce réseau d’escorts de luxe est son mode de financement. Non seulement les cardinaux ont recours à la prostitution masculine pour satisfaire leur libido ; non seulement ils sont homosexuels en privé alors qu’ils prônent une homophobie sévère en public ; mais ils s’arrangent aussi pour ne pas payer eux-mêmes leurs gigolos ! En effet, ils puisent dans les caisses du Vatican pour rémunérer les intermédiaires, qui varieront selon les époques, et les escorts, forts coûteux, sinon ruineux (jusqu’à 2 000 euros la soirée pour les escorts de luxe, selon les informations recueillies par la police italienne dans cette affaire)."
"Parmi les vingt cardinaux qui figurent actuellement dans l’organigramme de la Congrégation pour la doctrine de la foi, il y aurait une douzaine d’homophiles ou d’homosexuels pratiquants. Cinq au moins vivraient avec un boyfriend."
"Nombre de prêtres, de monsignori et de cardinaux sont décédés des suites du sida."
"L’homosexualité est devenue littéralement « hors de contrôle » dans les séminaires."
"Dans mon séminaire nous sommes environ une vingtaine. Sept sont clairement gays. Environ six autres ont, disons, des tendances. C’est à peu près conforme au pourcentage habituel : entre 60 et 70 % des séminaristes le sont. Parfois, on atteint les 75 %, me dit Axel."
"Un hétérosexuel ne peut pas se sentir complètement à l’aise dans un séminaire catholique, à cause – je cite leurs expressions – « des regards », des « amitiés particulières », des « bromances », des « garçonnades », de la « sensibilité » et de la « fluidité », de la « tendresse » et de l’« atmosphère homo-érotique généralisée » qui s’en dégage. Un célibataire non endurci y perd son latin !"
"Être dans un séminaire, c’est un peu comme être dans Blade Runner : personne ne sait qui est un humain et qui est un « répliquant ». C’est une ambiguïté que les hétéros vivent généralement très mal."
"La pornographie, essentiellement gay, est un phénomène si fréquent au Vatican que mes sources évoquent « de graves problèmes d’addiction parmi les prélats de curie."
"Ma théorie est que les prêtres pédophiles utilisent les informations dont ils disposent sur la hiérarchie catholique pour se protéger. C’est une forme de pression ou de chantage. Les évêques qui ont eux-mêmes des relations homosexuelles sont contraints de se taire."
"Bien des dérives de l’Église, bien des silences, bien des mystères s’expliquent par cette règle simple de Sodoma : « Tout le monde se tient."
"Durant ces chemsex parties, il y avait d’autres prêtres et employés du Vatican, ajoute l’un des témoins, un monsignore qui a participé à ces festins."
"La conclusion la plus frappante du rapport, véritable code qui permet de comprendre le Vatican, est le lien entre les affaires financières et l’homosexualité – la vie gay cachée allant de pair avec les malversations financières. Cette articulation entre le sexe et l’argent est bien l’une des clés de compréhension de Sodoma."
"Les abus sexuels de l’Église ne sont pas une page sombre du pontificat de Benoît XVI : il s’agit de la plus grande tragédie, la plus grande catastrophe de l’histoire du catholicisme depuis la Réforme, me dit un prêtre français."
"C’est vrai, par exemple, d’un cardinal francophone qui a adopté un migrant qu’il affectionnait particulièrement, suscitant l’étonnement de la police qui a découvert, en enquêtant sur le « sans-papiers », que l’ecclésiastique entendait bien faire légaliser son compagnon !"

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Fasciné par les migrants et l'immigration, l'évêque de Rome François a oublié un détail : quand le Christ parle de l'étranger dans le Nouveau Testament en se présentant lui-même comme Galiléen (la Galilée était un coin peu apprécié des Judéens), en incluant les Samaritains dans sa prédication ou en vantant les qualités de la foi du centurion romain, il évoque essentiellement sa mission qui consiste à faire évoluer le judaïsme de son époque, le faire passer à l'universalisme, autrement dit il insiste sur le fait qu'à parti de sa venue, de sa mort et de sa résurrection, le salut de Dieu ne sera plus accordé à un seul peuple mais à tous les hommes de bonne volonté. Cela n'a rien à voir avec les migrations de population.
Paul-Éric Blanrue.



jeudi 21 septembre 2023

Crise migratoire : quelles leçons tirer de la chute de l’Empire romain ? Par Chantal Delsol.

La sécession par les pieds, une solution pour demain ?
Oui, mais pour aujourd'hui aussi !


Un seul précédent historique permet de réfléchir à la situation de l’Europe aujourd’hui, explique la philosophe : le déclin de l’Empire romain. Alors que la France ne dispose ni de la chance géographique ni de la volonté politique pour endiguer l’immigration, analyse-t-elle, la solution pourrait être l’émigration.

L’arrivée massive de plusieurs milliers d’Africains en quelques jours à Lampedusa a provoqué une vague d’affolement dans les pays européens. Déplacements de gouvernants, promesses de solidarité européenne afin que l’Italie ne soit pas seule à porter la charge : toutes actions sur fond d’effroi – l’effroi de voir à l’œuvre ce déferlement, annonciateur de difficultés sans nombre.
Les pays d’Occident sont pourvus d’une rationalité économique qui produit la richesse ; de religions fondées sur l’autonomie ; et conséquemment, de gouvernements institués dans la liberté. Pendant que la plupart des pays d’Afrique vivent dans la pauvreté économique et sous des gouvernements despotiques. Aussi, puisque les déplacements sont possibles, rien ne peut empêcher les seconds de courir s’installer chez les premiers, pour profiter de tous ces avantages qui n’existent pas chez eux. Pendant tout le XXe siècle, on a vu des milliers et des milliers d’Européens aller s’installer en Amérique pour fuir les tyrannies et totalitarismes dont le Vieux Continent s’était fait alors une sorte d’apanage. Les humains cherchent le bonheur où il se trouve, ce qui est bien naturel.
Depuis un demi-siècle déjà, une partie des Européens, et une partie de plus en plus importante, s’inquiète de cette vague qu’on craint submersive. Ce n’est pas que les richesses ne soient pas partageables. Elles le sont. Ce n’est pas que la liberté ne puisse ouvrir son cercle. Elle le peut. Ce n’est pas que les nouveaux arrivants ont la peau foncée. Les Européens ne sont pas racistes. Le problème est culturel. Les nouveaux arrivants, et c’est là le paradoxe, sont dotés d’une culture de soumission (c’est là le nom précis de leur religion), qu’ils n’ont pas l’intention d’abandonner, et même à laquelle ils ont bien l’intention de nous enchaîner nous aussi. Pourquoi ce paradoxe ? Pourquoi vouloir profiter de notre culture de liberté et vouloir en même temps lui insuffler une culture de soumission ? L’historien Paul Veyne avait répondu à cette question en décrivant l’installation massive dans l’Empire romain de ceux qu’on appelait alors les « barbares » - c’est-à-dire les « autres » : « Ces barbares si envieux, admiratifs, imitateurs et cupides de la civilisation romaine, entendaient bien rester eux-mêmes tout en s’en emparant. » Devant cette situation, nombre d’Européens sont saisis d’affolement, d’une folle crainte de la perte de soi, de cette hystérie collective que décrivait si bien l’historien hongrois Istvan Bibo en parlant des nations d’Europe centrale : l’angoisse de voir sombrer sa propre culture. D’où la montée dans tous nos pays des partis dits populistes.
Comment empêcher un tel déferlement, qui laisse bien penser, et de plus en plus, à l’histoire du Camp des saints de Raspail, qu’on avait tellement vilipendé comme extrémiste ? Je dirais que pour qu’un pays européen parvienne au moins à réguler le flux, il lui faut bénéficier de deux conditions additionnées : la volonté politique ET la chance géographique. Un pays qui ne bénéficie pas de la chance géographique peut bien avoir la volonté politique, il n’y parviendra pas – c’est le cas de l’Italie. Un pays doté de chance géographique mais sans la volonté politique n’y parviendra pas non plus – c’est l’Allemagne. Le Danemark y parvient parce que doté des deux capacités. La France ne possède ni l’une ni l’autre. Il arrive bien souvent, et c’est le cas de l’instance politique européenne, des gouvernements allemands et aussi français, que la volonté politique soit carrément contraire : dans ce cas, on veut l’immigration et parfois l’immigration la plus massive possible (c’était le cas de Merkel) pour des raisons idéologiques (sans-frontièrisme et mondialisme) camouflées sous le besoin de main-d’oeuvre, c’est-à-dire par volonté de dissolution de soi. C’est dire que l’Europe est assez mal partie pour enrayer ce déferlement. D’autant que la démographie et les situations économico-politiques jouent de plus en plus en faveur de la migration. La natalité est massive dans les pays d’Afrique et s’effondre dans les pays d’Europe. La pauvreté économique, l’instabilité politique et les guerres intestines se déploient dans les pays d’Afrique pendant que la culpabilité et la honte de soi se déploient dans les pays d’Europe en même temps que la richesse et la liberté. On ne voit pas bien ce que les partis dits populistes pourraient changer à l’affaire.
La seule situation analogue dans notre histoire était celle de l’Empire romain sur le déclin. Nous avions alors ici en Europe la richesse et la liberté, et ceux appelés alors « barbares » étaient attirés à Rome comme des papillons vers la lumière. Finalement, leur nombre fut tel que la vie romaine sous le poids se détériorait et s’appauvrissait – on ne peut intégrer quand la masse des arrivants est trop énorme. D’autant que chez les Romains eux-mêmes, et particulièrement chez les chrétiens, montait un courant de pensée culpabilisant pour lequel les barbares étaient bien supérieurs aux Romains décadents et cupides (le prêtre Salvien écrit même « ce sont les Romains qu’il faut barbariser »). Tout était fait pour la dissolution de la culture romaine. Finalement, les écoles fermèrent les unes après les autres – ce qui est le signe majeur, et nous appelons les siècles suivants les siècles obscurs, parce que nous en avons si peu de connaissances, une grande partie de la culture s’étant dissoute dans le désordre régnant. Ainsi la richesse et la liberté s’en vont au chaos.
Cependant nous avons un atout majeur que les Romains n’avaient pas – même si je ne sais si cela confortera mes lecteurs ! Le monde des Romains était très étriqué, il s’arrêtait aux colonnes d’Hercule et aux confins de l’Inde. Tandis que nous avons le Nouveau Monde, occidental, c’est-à-dire du nord au sud nourri d’initiative économique, de liberté politique, et de religions de liberté. Naturellement les États-Unis subissent les vagues de migration mexicaines et les pays d’Amérique latine sont actuellement investis par des Vénézuéliens, mais il s’agit toujours de cultures de liberté, même si subsistent quelques reliquats de démence idéologique hérités du XXe siècle. Le nouveau monde ne sera pas investi par les migrants d’ici, parce qu’il bénéficie d’une chance géographique et d’une volonté politique inégalées (ce sont, et ce seront de plus en plus, des pays protestants, la culpabilité nigaude étant essentiellement catholique ou de culture catholique ; et le wokisme à culpabilité nigaude ressemble bien à la mode d’un jour). On peut penser, si l’on se risque à un peu de prospective, que nos arrière-petits-enfants, au moins les intrépides et les créatifs, quitteront « l’Europe aux anciens parapets » et émigreront en masse vers le nouveau monde, afin d’y retrouver leur culture d’initiative et de liberté, laissant derrière eux de nouveaux siècles obscurs. Sic transit gloria mundi.
Chantal Delsol.

LIEN.




mardi 19 septembre 2023

Bêtise d'Auguste Comte (et du culte de l'humanité).



"L’immense majorité des hommes adorent un Dieu, cause, origine de toutes choses. M. Auguste Comte ne veut pas entendre parler de ce Dieu-là, parce qu’il n’admet point que l’humanité se préoccupe des causes. L’humanité ! voilà le Grand-Être à qui doivent s’adresser désormais nos adorations. Or, de bonne foi, nous serait-il bien possible d’adorer l’humanité ? Encore si c’était un être abstrait, un mythe ! mais l’humanité n’a rien d’abstrait ni de mythique. C’est tout bonnement une collection d’êtres réels, en chair et en os, qu’on voit s’agiter, geindre et bourdonner incessamment pour satisfaire aux communes nécessités de la vie. Des laboureurs, des vignerons, des charpentiers, des rouliers, des épiciers, des portiers, des hommes politiques, des gendarmes, des argousins, des voleurs, des blanchisseuses, des couturières, des vivandières, des filles publiques, etc., etc., voilà l’humanité ! Certes, j’aime beaucoup tout ce monde-là, quoi qu’il soit bien un peu mêlé ; j’échange volontiers mes services contre les siens, pour parler le langage de notre ami Bastiat ; je suis disposé même à lui en rendre quelques- uns gratis ; mais, en vérité, je ne me sens aucune envie de l’adorer. J’aimerais autant m’agenouiller devant les carottes, les panais et les oignons de mon jardin, comme faisaient les Égyptiens ; ou bien encore devant le bœuf Apis ! Au moins, c’était une bonne bête ce bœuf Apis, c’était un honnête, un excellent animal de bœuf, qui mangeait paisiblement son foin, son trèfle ou sa luzerne, ruminait, se promenait de l’écurie au pré, et du pré à l’écurie, sans songer oncques à nuire à son prochain. Mais cette cohue bigarrée d’honnêtes gens et de fripons, de maîtres orgueilleux et de valets rampants, de consciences incertaines et de vertus biseautées qui s’appelle l’humanité ; non ! je ne puis l’adorer. Je l’aime : Homo sunc ; nil humani a me alienum puto. Mais par-delà, loin par-delà l’humanité, mon âme cherche un idéal, un type éternel du bon et du beau devant lequel elle puisse s’incliner et s’humilier, faible, imparfaite qu’elle est. C’est l’inconnu, me dit M. Auguste Comte. Eh ! que m’importe ! si mon âme a soif de l’inconnu ! si cet horizon connu et cadastré où vous voulez l’enfermer, l’étouffe... Pourquoi d’ailleurs, voulez-vous que mes aspirations et mes espérances ne dépassent point ce que mon intelligence peut connaître ? Parce que je suis incapable d’embrasser l’ensemble de ce vaste univers, et de remonter à sa cause ; parce que ma courte vue s’arrête aux limites de ce banc de sable où la Providence m’a jeté dans un coin perdu de la création, ne dois-je m’incliner que devant ce que je vois et ce que je conçois ? Parce que Dieu m’échappe, dois-je me faire mon propre Dieu ? Non ! mon âme ne cédera point à cet aveugle et misérable orgueil de s’adorer elle- même dans l’humanité, sous le prétexte que la science ne peut lui faire connaître un autre Dieu. Elle se dérobera à votre science ; elle ira chercher dans l’immense inconnu que vous n’avez pu pénétrer, et que l’intelligence humaine ne pénétrera jamais, l’auteur des êtres, le créateur des mondes et des hommes, et elle s’inclinera devant lui. Eh bien ! cette aspiration incessante et irrésistible de l’âme vers le type éternel du bon et du beau, vers l’idéal, vers l’infini, vers Dieu, le christianisme, même dans ses sectes les plus retardées, la satisfait. Votre religion, au contraire, la méconnaît et la repousse. Laissez-nous donc le christianisme, puisque vous n’avez à nous offrir qu’un culte plus grossier, plus étroit et plus bas !"

Gustave de Molinari.




Pierre Dupont de Nemours : "Le hasard, c’est un mot imaginé pour voiler l’ignorance."


« Qu’il y ait des êtres intelligents qui éprouvent des sensations, font des raisonnements, ont des volontés ; et qu’il y ait aussi des choses inintelligentes, uniquement soumises aux lois de la physique, de la chimie et de la mécanique, cela est évident pour nous comme notre propre existence.

« Que des êtres intelligents aient pu être produits par une cause inintelligente, cela est absurde ; par hasard, c’est un mot imaginé pour voiler l’ignorance.

« Que tous les êtres intelligents aient le pouvoir plus ou moins étendu, non pas de dénaturer mais d’arranger, de combiner, de modifier les choses inintelligentes ; c’est ce que prouvent tous nos travaux et ceux des animaux nos frères.

« Les êtres intelligents sont doués d’une volonté qui nous est manifeste ; et d’une force que nous ne pouvons nier, pour agir sur les corps, même en apparence contre les lois de la statique, de la gravitation et de la mécanique. C’est contre toutes ces lois connues que ma volonté, qui n’est point un corps et qui n’a aucun poids, gonfle et raccourcit mes muscles, au point de lever mon bras qui pèse dix livres et avec mon bras un fardeau d’un quintal. Nous renouvelons à tous moments cette expérience incompréhensible, et nous ne pouvons dire autre chose là-dessus, sinon : Mens agitat molem.

« Mais il est impossible de nous dissimuler que notre intelligence et nos forces, très éminentes en comparaison de celles d’une cigale, sont néanmoins extrêmement bornées. Et l’arrangement de l’univers, ses lois astronomiques, physiques, chimiques, anatomiques ; le développement, l’emploi tant de notre propre intelligence que de celle des autres animaux, nous montrent clairement qu’il y a quelque intelligence supérieure qui a pris plaisir à disposer le tout et les détails avec beaucoup de science et de sagesse ; qui est au moins à la collection des mondes ce que je suis à l’assemblage de ressorts, de roues, de pignons, que j’ai fabriqués de cuivre et d’acier, dans les proportions qui m’ont paru convenables, pour faire marquer à une aiguille l’heure qu’elle me dit avec une grande exactitude.

« Si je suis horloger, moi, avec le peu que j’ai d’esprit, l’immense horloge de l’univers a aussi un horloger.

« Qu’est-il ? Je n’en sais rien. Mais je connais de prime abord deux de ses propriétés : Il est intelligent et moteur.

« Et de quoi l’est-il ? De ce qui est mu et dénué d’intelligence.

« Il ne serait pas moteur s’il n’y avait pas quelque chose de mobile et de mu.

« Nous sommes donc conduits par des pas assez sûrs à une grande pensée, qui doit être l’expression d’une grande et fondamentale vérité : c’est que la masse entière de l’univers est composée de deux êtres : la matière insensible, involontaire et qui ne peut se mettre en mouvement par elle-même, mais qui peut y être mise ; l’intelligence qui a des volontés et des desseins, un pouvoir actif, celui de combiner, de modifier, d’arranger, de régir les éléments indestructibles de la matière. 

« Homme ! Oses-tu comparer la distance effrayante que tu reconnais entre toi et Dieu avec celle si petite qui m’a fait hésiter entre toi et la fourmi ? Cet espace immense est-il vide ?

« Il ne l’est pas, car il ne peut pas l’être ; l’univers est sans lacune.

« S’il est rempli, par qui l’est-il ? Nous ne pouvons le savoir. Mais puisque la place existe, il s’y trouve quelqu’un et quelque chose.

« Pourquoi n’avons-nous aucune connaissance évidente de ces êtres dont la convenance, l’analogie, la nécessité dans l’univers frappent la réflexion, qui peut seule nous les indiquer ? De ces êtres qui doivent nous surpasser en perfection, en facultés, en puissance, autant que nous surpassons les animaux de la dernière classe et les plantes ? Qui doivent avoir entre eux une hiérarchie aussi variée, aussi graduée que celle que nous admirons entre les autres êtres vivants et intelligents, que nous primons et qui nous sont subordonnés ? dont plusieurs ordres peuvent être nos compagnons sur la terre comme nous sommes ceux des animaux qui, privés de vue, d’ouïe, d’odorat, de pieds, de mains, ne savent qui nous sommes ni si nous sommes, au moment même où nous en faisons le bonheur ou le malheur ? dont quelques autres peut-être voyagent de globe en globe, ou, plus relevés encore, d’un système solaire à l’autre, plus aisément que nous n’allons de Brest à Madagascar ?

« C’est que nous n’avons pas les organes et les sens qu’il nous faudrait pour que notre intelligence communiquât avec eux ; quoiqu’ils puissent très bien avoir et que nous devons songer qu’ils ont des sens et des organes propres à nous discerner et à influer sur nous, de même que nous discernons et que nous régissons des races entières d’animaux qui nous ignorent et qui ne sont nos inférieurs que d’un très petit nombre de sens.

« Quelle pauvreté de n’en avoir que cinq ou six et de n’être que des hommes ? On peut en avoir dix, on peut en avoir cent, on peut en avoir mille, on peut en avoir un million...

« Quand le limaçon fut créé pour lui-même, le sylphe et l’archange ne l’ont pas été pour les humains. Toute espèce, tout individu vit pour soi.

« Ces intelligences ne sont au-dessus de nous et hors de la portée de nos sens que parce qu’elles sont dotées d’un plus grand nombre de sens et d’une vie plus développée et plus active. Ce sont des êtres qui valent mieux que nous et qui ont beaucoup plus d’organes et de facultés. Ils doivent donc, en déployant leurs facultés disponibles suivant leur volonté, de même que selon notre volonté, nous employons les nôtres, pouvoir disposer, travailler, manœuvrer la matière inanimée et agir aussi, tant entre eux que sur les êtres intelligents qui leur sont inférieurs, avec beaucoup plus d’énergie, de rapidité, de lumières et de sagesse que nous ne le faisons, nous qui cependant le faisons pour les bêtes qui nous sont subordonnées. Il est donc conforme à la marche et aux lois de la nature que les intelligences supérieures puissent ainsi, quand il leur plaît, nous rendre les services à la fois les plus importants et les plus ignorés.

« Vous ne pourriez m’affirmer que cela n’est pas qu’en prétendant que tout ce que vous ne pouvez voir physiquement n’existe point et soutenant que vous êtes les premiers des êtres après Dieu. Et je peux vous affirmer que cela est, appuyé sur toutes les lois d’analogie qu’il nous est donné de reconnaître dans l’univers.

« Si cela n’était pas, l’univers serait incomplet. Sa partie inférieure serait régulièrement ordonnée avec les gradations les mieux nuancées et les plus parfaites ; sa partie supérieure ne serait qu’un vaste désert.»

 Pierre Dupont de Nemours.




Gustave de Molinari et Dieu.

"On s’explique parfaitement l’antagonisme de la religion et de la science, car il n’est pas une seule des découvertes de la science qui n’ait contredit une tradition de la religion. Mais en ruinant les conceptions enfantines que l’humanité se faisait de la Divinité et d’elle-même, en remettant la terre et l’homme à leur place et à leur rang dans l’univers, en restituant aux lois naturelles les phénomènes physiques qui nécessitaient l’intervention divine et formaient le domaine du surnaturel, la science a-t-elle agi pour détruire la religion et finalement la remplacer ?
C’est là, on ne l’ignore pas, une opinion assez généralement répandue dans le monde de la science aussi bien que dans le monde religieux. Est-elle fondée ? Ne peut-on pas soutenir, au contraire, que les progrès de la science servent la religion, en la contraignant à remplacer ses anciennes preuves de l’existence de la Divinité par des preuves nouvelles, plus décisives, que lui fournit la science elle-même ; en agrandissant et en élevant la conception de l’idéal divin ?
C’est ainsi qu’en s’appuyant sur les données de la science on peut déduire l’existence d’une puissance supérieure, à laquelle l’homme se trouve subordonné, de l’existence du sentiment religieux même.
Ce sentiment a un caractère d’universalité. Il existe et il a existé de tous temps, quoique à des degrés divers, dans la multitude des créatures humaines. Il est distinct de tous les autres sentiments, de l’amour paternel, filial ou conjugal, de la sympathie pour les autres hommes ou les autres espèces. Or la science démontre qu’aucune des facultés de l’homme, aucune des forces physiques, intellectuelles et morales qui constituent son être, n’est inutile, que toutes remplissent une fonction nécessaire et répondent à un objet ou à un être existant. De même que l’existence du sentiment de la paternité prouve celle de la famille, l’existence du sentiment religieux prouve celle de Dieu.
Ce Dieu qu’atteste le sentiment religieux et qu’il suffirait seul à attester, la science a rétréci par quelques côtés le domaine de son activité, mais ne l’a-t-elle pas infiniment agrandi par d’autres ? Si Apollon ne conduit plus le char du soleil, si Jupiter ne lance plus la foudre, est-ce à dire que la Divinité n’ait plus aucun rôle actif à jouer dans l’univers, et, pour rappeler un mot célèbre, que la science puisse se passer de cette hypothèse ? Est-ce à dire que la matière se meuve d’elle-même sous l’impulsion des lois qui lui sont propres, qu’elle produise par l’opération mécanique et automatique de ces lois, le phénomène de la vie, qu’elle crée les organismes vitaux des espèces végétales et animales aussi bien que les mondes qui leur servent d’habitat ? Est-ce à dire que les forces morales, investies en quantités diverses et inégales dans l’homme et la plupart des espèces inférieures, sinon dans toutes, l’intelligence, la volonté, l’amour n’existent pas en dehors de l’humanité et de l’animalité terrestres ? Le spectacle de l’univers ne révèle-t-il pas leur présence et leur action incessante ? Certes, quand on observe le capital énorme de connaissances que l’humanité a accumulées, les inventions qu’elle a multipliées pour constituer l’outillage de sa civilisation, on demeure frappé de la somme d’énergie morale et d’intelligence qu’elle a dépensée, mais que sont nos outils les plus ingénieux et nos machines les plus perfectionnées en comparaison des organismes merveilleux des espèces animales et végétales ? Peut-on admettre que ces organismes si parfaits et si prodigieusement variés aient été produits par le jeu des forces brutes de la nature ? Quoique nous ne connaissions encore qu’incomplètement le mécanisme de la création des mondes et de la conservation de l’ordre dans l’univers, le peu que nous en savons n’atteste-t-il pas l’existence d’une énergie et d’une intelligence infinies, imprimant le mouvement à la matière et la transformant sans cesse ? — Soit ! dit-on, l’intelligence agit, elle intervient dans les combinaisons et les transformations de la matière, mais c’est une intelligence inconsciente. Seul, l’homme possède une intelligence consciente. Il n’existe point, par conséquent, dans l’univers, un être qui lui soit supérieur. Qu’en savons-nous ? Et cette prétention orgueilleuse peut-elle se justifier au regard de la raison ? Ne suffit-il pas pour en faire justice d’observer les êtres qui peuplent le milieu où nous vivons et de nous observer nous-mêmes ? Ne pouvons-nous pas constater que l’intelligence est d’autant plus consciente de son existence et de ses actes qu’elle se déploie avec plus de puissance ? Ne l’est-elle pas plus dans l’espèce humaine et en particulier dans les individualités d’élite que dans les espèces inférieures ? Comment supposer qu’une intelligence dont les œuvres sont infiniment supérieures à celles de l’homme, soit privée de la conscience d’elle-même ?
On voit que si la science a ruiné les conceptions primitives et grossières du Divin, c’est pour les remplacer par un concept religieux bien autrement vaste et élevé. Dieu, com- me elle nous le fait concevoir, c’est une puissance, une intelligence et un amour infinis. Ce n’est pas le Dieu d’un seul peuple et d’un seul monde borné, c’est le Dieu d’un univers sans bornes."

Gustave de Molinari.



mercredi 6 septembre 2023

Murray Rothbard, fan du christianisme !

"L'une des choses clés que le christianisme a apportées au monde, je crois plus que toute autre religion, est l'individualisme - l'importance suprême de l'individu. Je pense que c'est là où le cachet individuel de l'image de Dieu, et de son salut [par Jésus-Christ], devient d'une extrême importance, et le choix moral et tout le reste. Même si je vénère les Grecs - ce sont de grands rationalistes - les Grecs sont orientés vers la Polis. Ce dont ils se soucient, ce n'est pas l'individu, mais la Polis, la cité-État."
"La tradition de la loi naturelle d'Aristote et des stoïciens a été reprise par Thomas d'Aquin et les scolastiques [espagnols]. Ils ont redécouvert l'utilisation de la raison pour découvrir la loi naturelle ou les lois de la réalité, qui comprend les lois de l'éthique, et qui mettront également une limite ferme à l'État. En d'autres termes, l'État ne peut pas envahir une sphère ou des droits de chaque individu."
"Le problème du mal, bien sûr, comme nous le savons tous, est que si Dieu est bon et omnipotent, comment se fait-il que vous ayez le mal dans le monde ? La solution chrétienne orthodoxe est que l'homme est créé, les individus sont créés avec le libre arbitre, qui sont libres de choisir le bien ou le mal."
"L'un de mes écrivains préférés de tous les temps est G.K. Chesterton."
"Même si je ne suis pas croyant, je salue le christianisme, et surtout le catholicisme, comme le fondement de la liberté".
Murray Rothbard.





lundi 4 septembre 2023

Le Dieu des mathématiques.

" (...) S’il est difficile de prouver l’existence de Dieu en s’appuyant sur tel ou tel résultat particulier de la science, on peut en revanche soutenir que l’efficacité générale de la science constitue à elle seule un bon argument ! Cela tient à un fait tout à fait mystérieux : l’applicabilité des mathématiques à la réalité physique. Comme chacun sait, ce qui se passe dans l’univers matériel, contingent et temporel, apparaît comme piloté, encadré par ce qui existe, atemporellement, dans le monde immatériel et nécessaire des structures mathématiques. Il arrive en effet que des théories mathématiques, élaborées sans aucun lien avec la science de la matière, s’avèrent constituer –des décennies plus tard- les outils idéaux pour décrire, expliquer et prédire les phénomènes physiques. Dans un article célèbre, le prix Nobel Eugen Wigner s’étonnait de cette « déraisonnable efficacité des mathématiques dans les sciences de la nature ». Car enfin, d’où pourrait bien venir cette correspondance entre les deux domaines ? Comment expliquer que les nombres complexes, inventés à la Renaissance pour résoudre les équations polynomiales, se soient révélés indispensables à la compréhension de l’électricité, puis à la physique des particules ? Plus difficile encore : comment expliquer que Paul Dirac, par exemple, ait pu déduire a priori l’existence d’une nouvelle sorte de particules (les anti-particules), par pure exigence de symétrie et de beauté mathématique ? Une chose est claire : la correspondance entre les mathématiques et le monde physique ne peut pas venir de l’expérience, puisque les théories mathématiques sont élaborées indépendamment d’elle. Et, dans l’autre sens, on ne voit pas comment le monde platonicien des mathématiques –purement abstrait et immatériel- pourrait de lui-même agir sur le monde physique… Quant à invoquer une « heureuse coïncidence », cela paraît peu satisfaisant. En désespoir de cause, Eugen Wigner allait jusqu’à parler de « miracle ». On pourrait tenter une solution radicale, en affirmant qu’il n’existe en réalité qu’un seul monde, le monde mathématique, dont le monde physique ne serait qu’une petite province. Dès lors, plus de problème de correspondance ! Mais cette « solution » n’explique pas comment le monde mathématique –réservoir infini de mondes possibles- aurait le pouvoir de se concrétiser, de se cristalliser en un monde fini particulier. Il manque une médiation. Il ne reste, rationnellement, qu’une solution, et elle tombe sous le sens ; elle tient en deux points. Premier point : le monde platonicien des mathématiques n’existe pas tout seul, il ne flotte pas dans le vide (des idées ne peuvent pas exister sans une pensée) ; il suppose un entendement nécessaire, éternel, infini dans lequel les structures mathématiques sont « logées ». C’était la grande idée de saint Augustin. Second point : si le monde physique, contingent, temporel, est tissé de mathématiques, c’est parce qu’il a été créé par cette intelligence infinie –que nous appelons Dieu- qui a choisi un monde réel parmi l’infinité des mondes mathématiquement possibles. « Aei o Théos géomètrei disait Platon, Dieu toujours géométrise »."
Frédéric Guillaud.