BLOG DES AMIS DE PAUL-ÉRIC BLANRUE --- ARCHIVES, ACTUALITÉS, PROSPECTIVES --- DÉMYSTIFICATION ET CONTRE-HISTOIRE

lundi 1 septembre 2025

Le mystère des banques, expliqué par Murray Rothbard.



The Mystery of Banking de Murray N. Rothbard, publié par le Ludwig von Mises Institute, est un ouvrage fondamental qui vise à expliquer de manière claire et concise le système bancaire moderne à réserves fractionnaires, ses origines et ses effets sur l'économie. L'auteur y dénonce le caractère fondamentalement frauduleux du système bancaire actuel et critique l'intervention des banques centrales et des gouvernements qui perpétuent ce système inflationniste.

Le livre commence par explorer l'importance et les origines de la monnaie. Avant la monnaie, le troc présentait des limites sévères, telles que la double coïncidence des besoins et le problème des indivisibilités. La monnaie est une invention humaine ingénieuse qui a permis de surmonter ces obstacles en servant de moyen d'échange universellement désiré et en facilitant le calcul économique.

Les qualités intrinsèques de la monnaie qui l'ont fait choisir par le marché incluent une forte demande pour son propre usage, une grande divisibilité, une forte valeur par unité de poids (impliquant une rareté relative) et une grande durabilité. Historiquement, de nombreuses marchandises, de la morue aux cigarettes, ont servi de monnaie. L'unité monétaire, comme le "dollar" ou la "livre sterling", était à l'origine un simple nom pour une unité de poids d'or ou d'argent. Cependant, les gouvernements ont systématiquement trahi cette confiance en dévaluant la monnaie (allégeant sa définition en termes de métal précieux) pour s'enrichir, un processus appelé débasement.

Rothbard affirme que la quantité optimale de monnaie est "n'importe quelle quantité." L'augmentation de la masse monétaire ne confère aucun avantage social global ; elle ne fait que diluer le pouvoir d'achat de chaque unité monétaire. Il illustre cela avec le modèle de l'"Ange Gabriel", où un doublement magique de l'argent n'enrichit personne en termes réels, mais redistribue la richesse des "derniers dépensiers" aux "premiers dépensiers". La contrefaçon, qu'elle soit le fait d'individus ou du gouvernement (via l'émission de papier-monnaie), est un processus inflationniste qui lèse tous les détenteurs de monnaie existants.

Le livre explique ensuite comment les prix globaux sont déterminés par l'offre et la demande de monnaie, de manière analogue à la détermination des prix individuels. Le pouvoir d'achat de la monnaie est l'inverse du niveau général des prix. La demande de monnaie dépend de facteurs tels que le besoin de soldes de trésorerie pour les transactions, la fréquence des paiements, les systèmes de compensation (comme les cartes de crédit qui réduisent le besoin d'espèces) et la confiance dans la monnaie. Les anticipations inflationnistes ou déflationnistes sont le facteur le plus important, accélérant les réactions des prix. Ludwig von Mises a décrit les phases de l'inflation, où des attentes initialement déflationnistes peuvent masquer l'inflation, mais finissent par laisser place à des attentes inflationnistes qui accélèrent la hausse des prix.

Le système bancaire est divisé en banques de prêt (loan banking) et banques de dépôt (deposit banking). Les banques de prêt sont considérées comme saines et non inflationnistes, car elles ne font que canaliser l'épargne existante vers des prêts et des investissements. En revanche, le système de réserves fractionnaires est intrinsèquement frauduleux et inflationniste. Il permet aux banques de créer de la monnaie à partir de rien en émettant des reçus d'entrepôt (billets de banque ou dépôts à vue) qui ne sont pas entièrement couverts par des réserves réelles. Cela conduit à une expansion de la masse monétaire, à la hausse des prix et à une redistribution de la richesse. Rothbard soutient que ce système est comparable à la contrefaçon légalisée et qu'il est la cause fondamentale des cycles économiques de boom et de récession.

Dans un système de banque libre (free banking), où les banques sont soumises aux lois générales contre la fraude et doivent honorer leurs obligations de rachat à vue, l'expansion du crédit bancaire serait sévèrement limitée. La concurrence entre les banques et la menace des bank runs (paniques bancaires) agiraient comme des freins puissants à l'inflation. Une banque qui gonflerait excessivement ses crédits perdrait rapidement des réserves au profit de banques plus saines et ferait faillite.

L'annexe du livre nuance l'expérience de la "banque libre" en Écosse, affirmant que même là, les banques n'étaient pas véritablement libres, dépendaient de la Banque d'Angleterre et n'étaient pas toujours tenues de racheter leurs billets en espèces, ce qui leur a permis d'être inflationnistes.

La Federal Reserve System (la Fed), créé en 1913, est présenté comme un "moteur d'inflation" délibérément conçu. Il a centralisé les réserves d'or, a réduit considérablement les exigences de réserves, et a permis une expansion monétaire multiple. Des personnalités influentes de Wall Street, notamment la Maison Morgan, ont joué un rôle clé dans sa création et dans l'orientation de ses politiques inflationnistes, notamment pour soutenir la Grande-Bretagne après la Première Guerre mondiale et maintenir un "faux étalon-or".

Rothbard souligne la confusion autour des multiples définitions de la masse monétaire. Il insiste sur la distinction cruciale entre la monnaie (redeemable instantanément à vue au pair) et les autres actifs liquides. Il déplore la fin de l'étalon-or et le pouvoir illimité de la Fed d'inflater depuis 1971.

Pour revenir à une monnaie saine, Rothbard propose un plan radical: (a) retourner à un étalon-or non entravé par le gouvernement, (b) abolir la Federal Reserve System et revenir à un système de banque libre et concurrentielle, (c) séparer le gouvernement de la monnaie, et (d) imposer des réserves à 100 % aux banques commerciales, ou au moins un système où toute banque incapable de payer ses engagements à vue est rapidement liquidée. Il suggère de définir le dollar comme une unité de poids d'or, que la Fed liquide ses avoirs en or pour rembourser les billets de la Réserve fédérale et donner de l'or aux banques pour atteindre 100 % de réserves. La dénationalisation de l'or et du dollar sont également des éléments clés de son plan pour éliminer l'inflation et les cycles économiques.