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vendredi 10 octobre 2025

L’amour des animaux dans la tradition orthodoxe – Anthologie chronologique.


🏛️ 

IVe siècle


Saint Basile le Grand (v. 330–379)


« L’âme de la bête est la même poussière que celle de l’homme, et la vie en elle vient du même souffle. Ne la méprise donc pas. »
📖 Homélie sur l’origine du monde.


→ Basile voit dans chaque être vivant une part du souffle divin : l’homme doit protéger, non dominer.


Saint Jean Chrysostome (v. 349–407)


« Les animaux ont été créés pour que nous apprenions la douceur et la fidélité. »
📖 Homélies sur la Genèse, 9, 2.


→ Les bêtes sont pour Chrysostome des enseignants moraux ; elles révèlent la bonté du Créateur.


Saint Grégoire de Nysse (v. 335–395)


« Le monde visible n’est pas étranger à Dieu, mais rempli de Sa sagesse. Celui qui méprise les animaux nie une part de la beauté divine. »
📖 De hominis opificio, 8.


→ Grégoire unit la cosmologie et la théologie : toute créature participe à la gloire divine.


Saint Ambroise de Milan (v. 340–397)


« Ce n’est pas en dominant les bêtes que l’homme est grand, mais en les conduisant à la paix. »


→ Cette idée, reçue aussi en Orient, exprime une théologie de la seigneurie pacifique.


🕊️ 

VIIe siècle


Saint Maxime le Confesseur (v. 580–662)


« L’homme doit unir ce qui est divisé. En lui, le ciel et la terre, les animaux et les anges trouvent leur lien. Quand il détruit, il trahit sa vocation. »
📖 Ambigua, 41.


→ Pour Maxime, l’homme est prêtre de la création : sa mission est d’unir, non de séparer.


Saint Isaac le Syrien (VIIe siècle)


« Un cœur miséricordieux brûle pour toute la création : pour les hommes, les oiseaux, les bêtes, pour tout ce qui existe. (…) Il ne peut supporter d’entendre ou de voir un mal infligé à une créature, même la plus infime. »
📖 Homélies ascétiques, 71.


→ Le texte le plus célèbre de la tradition orientale sur la compassion universelle.


🕊️ 

VIIIe siècle


Saint Germain de Constantinople (v. 634–733)


« Tout ce qui respire prie à sa manière. Les cris des animaux sont pour Dieu des hymnes qu’Il comprend. »
📖 Homélie sur la Création.


→ Affirmation d’une liturge cosmique : la prière englobe toutes les créatures.


🌿 

XVIIe siècle


Saint Dimitri de Rostov (v. 1651–1709)


« Les animaux sont nos compagnons dans la vallée de larmes. Ils ne parlent pas, mais ils ressentent la chute du monde. Quand tu les consoles, tu consoles aussi la création déchue. »


→ Vision mystique : la souffrance animale participe à la souffrance cosmique du péché.


🕯️ 

XIXe siècle


Saint Théophane le Reclus (v. 1815–1894)


« Le cœur purifié voit dans chaque créature la gloire du Créateur. Alors l’âme ne supporte plus de blesser, même une mouche. »
📖 Lettres spirituelles.


→ L’amour des animaux naît d’une ascèse du regard, purifié de la convoitise et de la dureté.


Saint Séraphim de Sarov (v. 1759–1833)


« Tous les animaux sauvages venaient à lui sans crainte, car il avait acquis la paix intérieure. »
📖 Vie de saint Séraphim de Sarov, N. Motovilov.


→ L’homme pacifié rend aussi la nature pacifique : c’est l’image du Paradis restauré.


Saint Jean de Cronstadt (v. 1829–1908)


« Aimez toutes les créatures de Dieu, les animaux, les plantes, toute chose. Si vous aimez toutes choses, vous percevrez le mystère divin en elles. »
📖 Ma vie en Christ, t. II.

 

« Les animaux sont les œuvres de Dieu, et Il veille sur eux. Ne soyez pas cruels envers eux, car la cruauté envers les bêtes durcit le cœur de l’homme. »


→ Il relie la compassion animale à la pureté du cœur chrétien.


🌾 

XXe siècle


Saint Nectaire d’Égine (v. 1846–1920)


« L’amour du Christ n’a pas de bornes : il embrasse les hommes, les animaux et toute la création. »


→ L’amour chrétien ne peut exclure aucune créature, car le Christ s’est uni à toute chair.


Saint Silouane de l’Athos (v. 1866–1938)


« L’homme qui a l’Esprit Saint en lui aime toute créature. Il a pitié même des serpents et prie pour eux. »
📖 Écrits spirituels.


→ La compassion universelle devient ici signe de la présence du Saint-Esprit.


Saint Nikolaj Velimirović (v. 1881–1956)


« La compassion du Christ ne s’arrête pas à l’homme : elle descend jusqu’à la fourmi. L’homme saint devient le frère du monde entier. »
📖 Prières sur le lac.


→ La sainteté s’étend à tout l’univers : la fraternité devient cosmique.


Saint Amphiloque de Pochayev (v. 1894–1971)


« Si tu ne peux aimer ton frère, commence par ne pas battre ton chien. Car le Christ habite aussi dans la douceur que tu offres à un être sans défense. »


→ Théologie pratique de la douceur et de la conversion par les gestes.


Archimandrite Sophrony (Sakharov) (v. 1896–1993)


« En chaque être, même le plus petit, se trouve une étincelle du Logos. Celui qui contemple cela ne peut plus détruire sans pleurer. »
📖 Saint Silouane l’Athonite.


→ Vision métaphysique : chaque être contient une trace du Verbe divin.


Saint Porphyrios de Kavsokalyvia (v. 1906–1991)


« Quand tu pries, souviens-toi aussi des animaux. Car eux aussi sont créatures de Dieu et souffrent sans voix. »
📖 Paroles spirituelles.


→ Invitation à une prière universelle et compatissante.


🌍 

Époque contemporaine


Père Alexandre Men (v. 1935–1990)


« L’amour des animaux n’est pas un romantisme, mais une intuition christique : tout être est voulu et aimé par Dieu. »


→ L’amour universel découle directement de l’Incarnation.


Métropolite Kallistos Ware (v. 1934–2022)


« Aimer les animaux n’est pas un supplément sentimental à la foi chrétienne ; c’est une conséquence logique de la doctrine de la création. »
📖 The Orthodox Way (1979).


Patriarche Bartholomée Ier (né en 1940)


« La destruction de la nature et la cruauté envers les animaux sont des péchés, car elles offensent le Créateur lui-même. »
📖 Discours de Santa Barbara, 1997.


🕊️ 

Synthèse finale


De Basile le Grand à Bartholomée Ier, l’Orthodoxie enseigne que :

  • L’amour pour les animaux découle de la théologie de la création.

  • L’homme est prêtre et gardien du monde vivant.

  • La cruauté envers les bêtes brouille l’image de Dieu en nous.

  • La sainteté se reconnaît à la tendresse universelle.


    Dans la vision orthodoxe, l'amour pour les animaux découle de la théologie de l’Incarnation : Dieu a pris chair, donc toute chair devient digne d’amour. L’homme n’est pas le maître, mais le serviteur de la création. La cruauté envers les animaux n’est pas seulement immorale : c’est un signe de rupture avec la grâce.