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lundi 6 octobre 2025

Les délires du "sionisme chrétien".

En rupture totale avec ce que l'Église (catholique et orthodoxe) a enseigné, des protestants, depuis longtemps, ont choisi d'oublier la Tradition sacrée faisant des chrétiens les nouveaux israélites. Comptant pour rien la mission du Christ, les écrits de saint Paul et des Pères, ils ont annoncé que les juifs de la Diaspora devraient revenir en Palestine, comme s'ils étaient encore le peuple de Dieu en quête de la Terre Promise, distillant à leur propos une version archaïque et tribale-ethnique des Écritures et non chrétienne-universelle. Leur délires hérétiques ont été repris par les sionistes (mais pas par les juifs traditionalistes, d'abord majoritaires en Occident, puis minoritaires depuis la création d'Israël).
Voici ce que l'excellent compte Voice of Rabbis sur X en dit :

Une histoire du sionisme chrétien 
et de son influence sur le sionisme juif

Le sionisme chrétien n’est pas né en 1948. C’est une histoire vieille de plus de quatre siècles, qui relie les réformateurs radicaux, les puritains, les prophètes du XIXᵉ siècle et la rencontre décisive entre le révérend William Hechler et Théodore Herzl à Vienne.
🔹
Francis Kett (années 1580) — réformateur anglais exécuté pour hérésie. Il affirmait que les Juifs retourneraient sur leur terre avant la fin des temps.
🔹
Thomas Brightman (1607) — érudit puritain, lisant Isaïe et Ézéchiel au sens littéral : les Juifs reviendraient en Palestine.
Aux XVIIᵉ et XVIIIᵉ siècles, les puritains d’Angleterre et de Nouvelle-Angleterre reprennent ce flambeau. Les groupes millénaristes voient dans la restauration juive une condition du Royaume du Christ. Ce terreau va nourrir la culture prophétique évangélique des siècles suivants.
Au XIXᵉ siècle, le sionisme chrétien se structure.

Les prémillénaristes comme John Nelson Darby codifient la prophétie (le dispensationalisme).
Les évangéliques britanniques fondent la London Society for Promoting Christianity Amongst the Jews. L’idée d’un retour des Juifs en Palestine devient centrale dans les milieux revivalistes.
Entre alors en scène le révérend William Hechler (1845–1931), pasteur anglican passionné de prophétie.
En 1884, il publie La Restauration des Juifs en Palestine selon la prophétie, convaincu que la Bible annonce ce retour.
Quand Herzl publie Der Judenstaat en 1896, Hechler se précipite à sa rencontre à Vienne. Herzl notera dans son journal :
« Je lui dois d’avoir été présenté au Kaiser allemand. »
La foi de Hechler donna à Herzl la certitude que l’histoire divine soutenait son projet.
Plus qu’un soutien, Hechler lui ouvrit les portes du pouvoir : en avril 1896, il le présenta au grand-duc de Bade, oncle de Guillaume II — ce qui mena à une audience impériale.
Le paradoxe
Hechler soutenait le sionisme pour des raisons religieuses.
Herzl le poursuivait pour des raisons politiques et laïques : créer une nationalité juive moderne pour échapper à l’antisémitisme.
Deux visions opposées, un même résultat : la fondation d’un État juif en Palestine.
Une ligne continue

Années 1500 : Kett prédit le retour.
Années 1600 : les puritains le prêchent.
Années 1800 : les dispensationalistes le codifient.
Années 1890 : Hechler inspire Herzl.

XXᵉ–XXIᵉ siècles : les évangéliques voient Israël comme l’accomplissement d’une prophétie.
Depuis, nombre de sionistes juifs ont repris les interprétations bibliques évangéliques plutôt que celles de la tradition juive.
Exemple : en 2010 à Auschwitz, Benjamin Netanyahou cite la prophétie des ossements desséchés (Ézéchiel 37), interprétant la renaissance d’Israël comme résurrection du peuple juif — une lecture née non du judaïsme, mais du sionisme chrétien du XIXᵉ siècle.
Le premier exemple connu date de 1864 : le sermon du révérend Charles Haddon Spurgeon au Metropolitan Tabernacle pour la British Society for the Propagation of the Gospel Among the Jews.
Il y déclarait :
« Nous attendons ces deux choses : que les Juifs soient rétablis et convertis. Dans quel ordre ? Peu importe : ils le seront tous deux. »
Des idées politiques venues du christianisme
De nombreuses idées dites « sionistes » sont d’origine chrétienne :
L’idée qu’un État juif en Palestine servirait de relais à la culture européenne vient du luthérien Benedetto Musolino (1851).
Il proposait déjà que la langue nationale soit l’hébreu (ce que Herzl refusait).
Le slogan « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » circulait déjà chez les sionistes chrétiens comme Lord Shaftesbury et Alexander Keith dans les années 1840.
L’argument du « refuge juif contre les massacres à venir » fut formulé par C.F. Zimpel, théologien allemand, dès le milieu du XIXᵉ siècle.
Conclusion
Aujourd’hui encore, des millions d’évangéliques lisent Israël à travers le prisme tracé par Kett et Brightman, dynamisé par Hechler, et concrétisé par Herzl.
Le sionisme chrétien et le sionisme juif — jadis séparés — ont fini par fusionner, dans une alliance à la fois politique et théologique.
Et, bien sûr, c’est la Bible annotée de Scofield qui a rendu cette vision populaire dans le monde protestant.