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mardi 21 avril 2015

Gollnisch s'interroge ; C.S. Lewis répond.




Après son coitus interruptus lors de la course aux Régionales, Bruno Gollnisch s'interroge  : "Je croyais que mes compétences juridiques, politiques en ce qui concerne la conduite pendant des décennies d’un groupe au Conseil régional pouvaient me permettre de rendre quelques services à notre cause... Il semblerait, apparemment, que ce ne soit pas l’avis d’un certain nombre de jeunes gens qui préfèrent rester entre eux. À partir de ce moment-là, je leur en laisse, en quelque sorte, la responsabilité. Et par avance, citant pour une fois le général de Gaulle, je leur souhaite bien du plaisir." (ICI)
Sans oser parler de mon dernier livre, qui explique bien des choses, sinon l'essentiel, l'ancien délégué général du FN fait part de ses préoccupations concernant l'évolution de son parti : "Il paraîtrait qu’il y ait un Front national nouveau, en rupture, ou opposé, ou distinct du Front national ancien, dont je serais paraît-il l’une des incarnations... Mais en quoi nous distinguons-nous de ce que, bec et ongles, avec Jean-Marie Le Pen, avec moi-même, des milliers, des millions d’électeurs, de militants, ont défendu au cours de toutes ces années ?"
Tout ceci est amusant, mais un peu tardif. Le Patriarche lui-même, qui a préféré sa fille non seulement à sa cousine et à ses voisines mais aussi à son meilleur lieutenant en faisant tout ce qui était en son pouvoir pour écarter ce dernier de la présidence du FN, se demande comment on peut lui être fidèle à ce point-là. C'est une vraie question. Il aura manqué à Gollnisch l'âme d'un chef. Les fins de mois sont difficiles et l'université française ne forge pas le caractère.
Au moins aura-t-il eu le mérite de pointer du doigt le grand tournant qui s'opère sous nos yeux. Au FN aussi, "le changement c'est maintenant". À l'adresse des plus jeunes qui vivent dans la quête éperdue des suffrages de leur temps, C. S. Lewis (l'auteur du Monde de Narnia), qui fut monarchiste, chrétien et même traditionaliste, écrivait : "Il m'eut bientôt débarrassé de ce que j'ai appelé mon snobisme chronologique qui me faisait accepter sans discernement le climat intellectuel commun à notre siècle et supposer que tout ce qui était démodé était, par cela même, discrédité. Il fallait trouver pourquoi les choses étaient démodées. Avaient-elles jamais été réfutées (dans ce cas par qui, où et jusqu'à quel point ?) ou étaient-elle simplement mortes, comme les modes ? Dans ce dernier cas, cela ne nous apprenait rien sur leur vérité ou leur fausseté. Ayant compris ceci, nous comprenions que notre siècle était, lui aussi, une période, et qu'il avait certainement, comme toutes les autres périodes, ses illusions caractéristiques qui se dissimulent le plus souvent dans ces postulats largement répandus qui sont tellement enracinés dans une époque que personne n'ose les attaquer ni ne juge nécessaire de les défendre." (Surpris par la joie, 1955).
Il est à craindre que la démocratie républicaine et spectaculaire empêche la nouvelle génération, plus encore que l'ancienne, de comprendre que le présent, dont on fait l'étalon suprême de toutes les valeurs, n'est jamais que du passé en cours de fabrication - et, par conséquent, qu'il faut savoir résister à ses attractions quand notre âme est en jeu.

Paul-Éric Blanrue