"Ce gouvernement, je le mets en question pour ce qui me concerne,
laissant d’ailleurs aux autres la faculté de le servir, de le paver, de
l’aimer, et finalement de mourir pour lui.
Mais quand bien même
tout le peuple français consentirait à vouloir être gouverné dans son
instruction, dans son culte, dans son crédit, dans son industrie, dans
son art, dans son travail, dans ses affections, dans ses goûts, dans ses
habitudes, dans ses mouvements, et jusque dans son alimentation,
je déclare qu’en droit, son esclavage volontaire n’engage pas plus ma
responsabilité que sa bêtise ne compromet mon intelligence.
Et si,
en fait, sa servitude s’étend sur moi sans qu’il me soit possible de m’y
soustraire, s’il est notoire, comme je n’en saurais douter, que la
soumission de six, sept ou huit millions d’individus à un ou plusieurs
hommes entraîne ma soumission propre à ce même ou à ces mêmes hommes, je
défie qui que ce soit de trouver dans cet acte autre chose qu’un
guet-apens, et j’affirme que, dans aucun temps, la barbarie d’aucun
peuple n’a exercé sur la terre un brigandage mieux caractérisé.
Voir, en effet, une coalition morale de huit millions de valets contre
un homme libre est un spectacle de lâcheté contre la sauvagerie de
laquelle on ne saurait invoquer la civilisation sans la ridiculiser ou
la rendre odieuse aux yeux du monde."