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jeudi 17 août 2023

Les souverains de notre palais mental.

"Nous devons nous appliquer à devenir les souverains, les rois légitimes de notre palais mental, afin de subsister à travers les vicissitudes de l’existence, les émotions, les influences négatives, les propagandes, les lignes de parti, la publicité commerciale et idéologique, la morale civique et les « valeurs républicaines » dont on nous rebat les oreilles du matin au soir.
Que nous importe ce que croient les gens qui cherchent à nous catéchiser de force ? Ils ont leur vie qui n’est pas la nôtre. Face à tout groupe, et plus particulièrement face à l’État-Léviathan qui se pare des atours de l’État-papa-maman pour mieux nous séduire, il faut trouver puis conserver et développer notre « Je ».
Le « Je » est le fondement de nos rapports à l’existence et pourra ensuite, si nous le souhaitons, nous conduire loin, beaucoup plus loin... En attendant, pour exister avec authenticité, il importe de nous forger une conscience aussi libre que possible, autonome, structurée, tournée vers des principes supérieurs, sans quoi l’on reste englué dans l’ambiance générale, le bruit de fond, la matière dans ce qu’elle a de misérablement vulgaire et l’on reste l’esclave du « règne de la quantité » que décrivait René Guénon.
Le projet est d’apprendre à nourrir notre volonté et l’orienter pour faire émerger nos potentialités, notre puissance (et la dompter). Comme disait le Bouddha : « Celui qui est le maître de lui-même est plus grand que celui qui est le maître du monde. » On en revient au reproche qu’Aristote adressait à son pupille, Alexandre le Grand : « Tu as conquis le monde mais tu ne t’es pas conquis toi-même ». C’est en ayant ces observations à l’esprit que nous pouvons mener une vie digne et noble, au lieu d’être assujettis au flot existentiel, submergés par les mesures prises par les ingénieurs sociaux, abrutis par les ordres des petits et des grands chefs qui veulent décider à notre place de ce que nous devons dire, penser, écrire, faire, être.
Nous n’appartenons pas aux autres. Nous appartenons à nous-mêmes, je ne le répèterai jamais assez. À notre niveau, artistes ou pas, nous sommes des créateurs. Nietzsche remarque que « l’individu est quelque chose d’entièrement nouveau et créateur de nouveauté, quelque chose d’absolu auquel toutes ses actions appartiennent en propre. Il n’emprunte qu’à lui-même les valeurs qui règlent ses actions, car lui aussi doit interpréter de façon toute individuelle les mots d’ordre reçus. Même s’il n’invente pas la formule ; il en a au moins une interprétation personnelle : en tant qu’interprète il est encore créateur » (La Volonté de puissance).
Tout croyant sait que le salut est individuel. C’est en premier lieu devant nous que nous sommes comptables de ce que nous faisons puisque nous en subissons, nous, les conséquences - dans cette vie d’abord, et dans l’autre ensuite pour ceux qui y croient. Nous devons lutter contre nos habitudes mentales, nos faiblesses, nos erreurs de perception, nos tendances contradictoires. Et affronter avec vigueur les entreprises de ceux qui veulent faire intrusion dans nos têtes pour s’asseoir sur le trône à notre place.
C’est de nous qu’il s’agit, dans cette vie, pas d’un tiers, pas d’un escroc politique ayant passé des années à tromper ses électeurs et à trahir ses amis pour accéder aux plus hautes fonctions. Nul n’a le droit de nous imposer une façon de voir le monde. Nul ne peut moralement exiger que nous fassions le contraire de ce que nous voulons. Nul ne peut avoir la prétention de savoir mieux que nous ce que nous désirons. Il est déjà si difficile de le savoir soi-même qu’il est impossible à d’autres d’y parvenir !
À cet effet, il faut nous efforcer de trouver un axe intérieur, sentir la force intime qui émane de notre être, chercher un point d’appui en nous-mêmes, le lieu de notre conscience non altérée, détecter notre Centre et nous y relier avec constance.
Ce Centre est situé au cœur de notre royaume intérieur. C’est nous, au sens strict. Ce Centre, « loin de nous comprimer, nous dilate en nous offrant un espace intérieur sans limites et sans ombres » (Frithjof Schuon, Avoir un Centre, L’Harmattan, 2010).

SÉCESSION.